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L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - Version imprimable

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Re : Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - jkf - 11-06-2021

(11-06-2021, 09:14 PM)admirateur17 link a écrit :J'avoue que pour la lessive je suis aussi particulièrement incompétent. Et c'est pas bien. En ce qui concerne les sacs dans le coffre de la voiture, je crois que Patrick en est a découvrir la vie de sa fille...
Hello Admirateur17,
Pas bien, pas bien, tant qu'on en a pas réellement l'utilité, moi ça m'allait très bien.  :Smile
Et effectivement, dans les sacs, il y a de quoi gérer une tranche de vie plutôt méconnue des deux filles.  :-[
Merci pour ton post.
A+
Jkf


Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - jkf - 12-06-2021

CHAPITRE V (1/2)


La voiture est chargée. J’ai embrassé les filles en leurs laissant l’appartement. Caroline m’a fait un énorme câlin encore plus appuyé que d’habitude, comme si elle avait quelque chose à se faire pardonner. Mais je sais. Enfin non, je suppose. Disons que je me laisse le temps parce que j’ai besoin de me préparer à digérer ce qui ne m’était jamais venu à l’esprit auparavant et s’impose maintenant comme une évidence.

- Bonne route et ne roule pas comme un dingue. Tu as tout ton temps.
- C’est fou, je crois entendre ta mère.
- C’est que je te connais. Rappelle moi combien il te reste de points sur le permis ?
- Presque autant que toi ma chérie. Mais ne t’inquiète pas, je t’appelle dès que je suis à Nice.
- Je t’aime papa. Fais bien attention à toi. On se retrouve à la châtaigneraie la semaine prochaine.
- Super ! Et pas de bêtises toutes les deux.
- Ben ! Pourquoi veux-tu qu’on fasse des bêtises. On s’entend trop bien Léa et moi et puis si on a un soucis, maman est toujours là.
- Bon allez je vous laisse. J’ai encore de la route à faire.

J’ai abandonné Léa et Caroline sur le bord du trottoir et dans le rétroviseur de ma Mercedes, avant que leurs silhouettes ne disparaissent derrière le premier virage, j’ai vu les filles reprendre le chemin de l’appartement, la main dans la main, heureuses j’en suis certain, de se retrouver seules dans l’intimité de leur couple.

- °° -

Compliqué pour un père de se rendre à l’évidence. Caroline n’est pas comme les autres. Enfin comme la majorité des autres. Léa n’est pas non plus comme les autres et outre sa beauté remarquable, il y a ce petit quelque chose qui fait qu’elle est différente. Mais en quoi sont-elles si différentes ? Je ne sais pas dire et c'est dérangeant, probablement la preuve que je fais fausse route. Tout est brouillé dans mon esprit. Je ne sais pas si c’est bien. Je ne sais pas si c’est mal et si c’est le cas, en quoi serait-ce mal ? Je suis noyé dans mes incertitudes, conscient que mes convictions sont en train de prendre l’eau.

Elles sont sympathiques, joueuses, rêveuses, admirables toutes les deux et pourtant je comprends que dans leur schéma, il n’y aura aucune place pour la gente masculine. Je vois d’ici la déception d’Eléna qui aimerait, je suis sûr, être grand-mère à un âge où elle pourrait encore établir une complicité avec ses petits enfants et là, je crois que c’est plutôt mal parti. Et puis, il y a le regard des autres, de la famille qui ne vont pas comprendre, des amis qui moins concernés, seront plus indulgents.

Je fouille dans ma mémoire à la recherche de moments où j’aurais pu inciter, provoquer mais je ne trouve rien. Aucun indice aussi du côté d’Eléna. Nous avons tous les deux élevé Caroline en notre âme et conscience, pour qu’elle puisse, armée de notre expérience, porter seule le flambeau de sa vie, selon ses propres concepts. Et maintenant qu’on est au pied du mur, qu’elle a choisi ce qui lui semble être le mieux pour elle, pourrait-on être capable de la blâmer ? Non, c’est stupide. Totalement stupide.

Je comprends que le voyage va être long, très long, engoncé dans mes pensées divergentes et opposées qui me tiraillent de toutes parts ; tous ces dilemmes qui me sautent à la figure. Je sais que je ne trouverai pas la solution parce qu’elle est déjà devant mes yeux et qu’il me faut juste l’accepter.

Je veux penser à autre chose, éviter de me prendre la tête pendant les douze heures du trajet qu’il me reste à parcourir. Mais lorsqu'un sujet taraude l'esprit, compliqué de l'évacuer aussi simplement.


- °° -



Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - curieux - 12-06-2021

Bonsoir jkf,
c'est dur pour un papa qui n'a pas vu grandir sa fille et qui n'a pas suivi l'évolution des plaisirs de la jeunesse.
Mais je pense que très bientôt Léa va le mettre au parfum.


Re : Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - jkf - 13-06-2021

(12-06-2021, 11:39 PM)curieux link a écrit :Bonsoir jkf,
c'est dur pour un papa qui n'a pas vu grandir sa fille et qui n'a pas suivi l'évolution des plaisirs de la jeunesse.
Mais je pense que très bientôt Léa va le mettre au parfum.
Hello Curieux,
Les parents de nos jours sont très vites dépassés et pour rester dans la course, possible qu'il faille compter sur Caroline, Léa et bien d'autres ...
A+
Jkf


Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - jkf - 13-06-2021

CHAPITRE V (2/2)


Depuis dix minutes, il s’est mis à pleuvoir, une pluie fine qui transperce tout. Derrière mes essuies glaces, sur le bord de la route, collée aux hautes herbes, la silhouette d’une jeune femme se dessine, le pouce levé en l’air, un bout de tissu jeté sur les cheveux pour se protéger la tête. J’hésite. Je freine. Je n’ai pas pour habitude de prendre des auto-stoppeurs même si dans mon jeune temps, j’ai souvent utilisé ce moyen de transport économique et parfois bien sympathique. Je m’arrête à sa hauteur, baisse la vitre et je vois sa frimousse toute mouillée qui se penche à la portière.

- Vous allez où ?
- Euh ! Paris c’est possible ?
- Oui, c’est sur ma route.
- Porte de la Chapelle ou porte d’Orléans. Je ne fais pas de détour. Ça vous convient ?
- Très bien, ça ira parfaitement.
- Vous mettez votre sac dans le coffre, je vous l'ouvre.
- Non merci, à l’arrière, je préfère.
- Comme vous voudrez.

Elle prend place sur le siège passager après avoir retiré le plastic qui lui servait d’imperméable, accroche la ceinture de sécurité et nous nous dévisageons l’espace d’un instant, avant de redémarrer.

C’est fou comment en une poignée de secondes on arrive à se faire une idée de la personne qui est en face de nous. J’ai lu dans son regard, des yeux marron foncés presque noirs, qu’elle me prenait pour un PDG ou quelque chose du genre. J’ai tout qui va bien ; la Mercedes, les sièges en cuir, ma tenue vestimentaire cool mais de bonne facture, ma coiffure et mon style. Elle a vu à mon coup d’œil que je l’ai positionnée parmi les marginales car elle a tout qui correspond ; des chaussures lourdes montantes, des cheveux d’un rouge acide, un maquillage sombre, des tatouages sur les bras et les avant bras, une tenue propre qui l’habille sans la mettre en valeur ; pantalon noir, polo noir.

- Déçu, me demande-t-elle ?
- Non. J’avais envie de me changer les idées et vous tombez bien.
- Je préfère vous le dire de suite, je n’ai pas envie de baiser si d’aventure…
- Ah ! Parce que pour vous, se changer les idées c’est baiser ?
- Pour ceux qui ont du fric, c’est souvent le cas et vous semblez être à l’aise de ce côté, donc j’anticipe pour que les choses soient bien claires.
- Et si je pensais comme eux ?
- Alors, je préfère que vous me débarquiez, quitte à affronter à nouveau la pluie, plutôt que de partir sur un malentendu. Vous comprenez ?
- OK. Maintenant que vous êtes là, confortablement installée, je préfère vous épargner la pluie sans vous baiser. Ça vous va ?
- Je ne sais pas pourquoi mais j’ai envie de vous faire confiance. 
- Merci pour le compliment. Vous vous appelez comment ? Moi c’est Patrick.
- Mon prénom, c’est Harmonie mais je déteste. Je préfère qu’on m’appelle Nini.
- Pourquoi ? Harmonie, c’est peu courant et c’est très joli.
- Peut-être mais je trouve que ça ne me correspond pas et puis ce n’est pas moi qui a choisi.
- Oui effectivement, vu sous cet angle.
- Je n’ai pas beaucoup dormi cette nuit. Ça ne vous dérange pas si je m’assoupis un peu ?

Harmonie cale ses jambes contre le tableau de bord, le corps enfoncé dans le siège demi-baquet, les bras croisés sur la poitrine, la tête posée sur une épaule. Je la regarde. Je m’habitue doucement à son physique, un peu punk, possible un peu gore ou peut-être gothique vu les dessins qu’elle porte sur la peau. Sa respiration est douce et régulière maintenant. Je suppose qu’elle s’est endormie. La trentaine passée, elle sourit dans son sommeil et son visage paraît de suite moins dur, plus féminin, probablement plus mignon qu’il n’y paraît dans un contexte un peu plus socialisé.


- °°° -



Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - curieux - 13-06-2021

Salut jkf,
Pour une fois, celle-ci n'est pas de toute beauté, bien que, endormie, elle est déjà mieux. La suite va t-elle être pétillante quand même ?
l'avenir nous le dira.


Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - emmanolife - 13-06-2021

Caroline est lesbienne, alors ? Dur à avaler pour un papa qu'on n'a pas tenu au courant, mais ce n'est pas cela qui l'empêchera d'avoir des petits-enfants. A ce titre, c'est tout de même moins dur d'avoir une fille lesbienne qu'un fils gay qui aura beaucoup plus de difficulté à devenir papa.

Et l’auto-stoppeuse, ne serait-elle pas lesbienne elle aussi ? Elle a un abord un peu rugueux, et une façon de mettre les points sur les i, qui laisse penser qu'elle n'est pas du tout intéressée par un quadragénaire, même riche et élégant et possédant une belle voiture. De là à imaginer qu'aucun homme ne l'intéresse... Pour l'instant, il n'y a qu'une seule chose de sympathique chez elle, c'est qu'elle fait confiance. Si elle était inquiète elle ne se serait pas endormie si vite.


Re : Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - jkf - 13-06-2021

(13-06-2021, 06:15 PM)curieux link a écrit :Salut jkf,
Pour une fois, celle-ci n'est pas de toute beauté, bien que, endormie, elle est déjà mieux. La suite va t-elle être pétillante quand même ?
l'avenir nous le dira.
Hello Curieux,
C'est vrai que même endormie dans son innocence, Harmonie n'est pas une créature de rêve. Révoltée, révolutionnaire, anti-capitaliste, anti- sociétal, la jeune femme emprisonnée par son vécu arrivera t'elle à faire pétiller le monde qui l'entoure ?
J'ai quelques éléments de réponses  Smile mais il est encore trop tôt pour les coucher ici  Wink
Merci pour ton commentaire.
A+
Jkf


Re : Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - jkf - 13-06-2021

(13-06-2021, 10:15 PM)emmanolife link a écrit :Caroline est lesbienne, alors ? Dur à avaler pour un papa qu'on n'a pas tenu au courant, mais ce n'est pas cela qui l'empêchera d'avoir des petits-enfants. A ce titre, c'est tout de même moins dur d'avoir une fille lesbienne qu'un fils gay qui aura beaucoup plus de difficulté à devenir papa.

Et l’auto-stoppeuse, ne serait-elle pas lesbienne elle aussi ? Elle a un abord un peu rugueux, et une façon de mettre les points sur les i, qui laisse penser qu'elle n'est pas du tout intéressée par un quadragénaire, même riche et élégant et possédant une belle voiture. De là à imaginer qu'aucun homme ne l'intéresse... Pour l'instant, il n'y a qu'une seule chose de sympathique chez elle, c'est qu'elle fait confiance. Si elle était inquiète elle ne se serait pas endormie si vite.
Hello Emmanolife,
Eh oui, Caroline est homosexuelle et pour un père ou une mère d'ailleurs, il faut accuser le coup, surtout lorsqu'il n'y sont pas préparés.
Harmonie est-elle lesbienne elle aussi ? Pour l'instant, rien ne le laisse présager. Après ...
Tous ceux qui se sont positionnés en marge de la société ou qui ont été rejetés par elle, ont une frustration énorme vis-à-vis d'elle et cachées derrière cette frustration il y a bien des choses, des apparences, des valeurs qui existent sous forme latente mais sont incapables d’émerger.
Merci pour ton commentaire.
A+
Jkf


Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - grostimido - 14-06-2021

Bonjour jkf,

J'ai rattrapé mon retard.
Je m'en doutais que les deux filles été très proche et je suis sur que Patrick la découvert dans le coffre de la voiture de sa fille .
Oh une belle auto-stoppeuse qui prend Patrick pour une personne qui a beaucoup d'argent
Patrick un gentleman et ne saut pas sur tout se qui bouge même si elle est mignonne.

merci jkf pour c'est ces chapitres
A+
bises



Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - admirateur17 - 14-06-2021

Oui, merci pour ces chapitres. Les personnages s'installent, se placent. Si l'auteur a le temps, peut être tient on notre lecture de l'été !


Re : Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - jkf - 14-06-2021

(14-06-2021, 03:06 PM)grostimido link a écrit :Bonjour jkf,

J'ai rattrapé mon retard.
Je m'en doutais que les deux filles été très proche et je suis sur que Patrick la découvert dans le coffre de la voiture de sa fille .
Oh une belle auto-stoppeuse qui prend Patrick pour une personne qui a beaucoup d'argent
Patrick un gentleman et ne saut pas sur tout se qui bouge même si elle est mignonne.

merci jkf pour c'est ces chapitres
A+
bises
Hello Grostimido,
Oui j'ai vu que tu avais disparu des écrans radars pendant quelques temps et donc un peu plus de lecture en perspective. Effectivement les deux filles étaient trop proches pour n'être que de simples amies et dans le coffre de la voiture de Caroline, probablement des achats inconsidérés en lien avec leur sexualité, des choses suffisamment explicites pour que Patrick n'ait plus beaucoup de doutes.
Pour éviter de ruminer, il lui vient l'idée de prendre un auto-stoppeuse.
A+ et merci pour ton commentaire.
Jkf



Re : Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - jkf - 14-06-2021

(14-06-2021, 08:30 PM)admirateur17 link a écrit :Oui, merci pour ces chapitres. Les personnages s'installent, se placent. Si l'auteur a le temps, peut être tient on notre lecture de l'été !
Hello Admirateur17,
J'ai un peu de temps devant moi, donc ça devrait aller mais de là à tenir tout l'été, c'est une autre histoire.  Smile
On verra bien et comme je n'en sais rien moi même ... :o
Merci pour ton commentaire.
A+
JKF


Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - jkf - 15-06-2021

CHAPITRE VI (1/2)


Les essuies glaces évacuent prestement l’eau qui martèle le pare-brise avec une fébrilité déconcertante. Harmonie est toujours endormie, pelotonnée dans le siège passager. Moi qui comptait sur elle pour chasser mes pensées envahissantes, je suis de la revue. Pour autant, sa simple présence suffit à détourner mon attention de mes cogitations internes et puis petit à petit, je m’habitue à regarder la réalité en face, sans même m’en apercevoir, inconsciemment devant le bonheur de Caroline que je ne voudrais pour rien au monde perturber.

Les cheveux d’Harmonie laissent entrevoir entre les boucles rouges, rosées pour certaines, une frange de peau plus pâle au sommet de son crane. Peut-être un début de calvitie et cette simple évocation totalement décalée par rapport à la réalité, me fait largement sourire. Ironiquement j’avoue, j’en arrive à me demander si la tonsure ne serait pas en sa faveur, au point où elle en est avec son physique. De naturel, elle doit être châtain clair aux vues des racines capillaires qui commencent à se manifester. Accrochée au lobe de son oreille, la seule visible de ma place, une boucle argentée assez grossière, pas très jolie, sur laquelle est représentée une tête de mort provocatrice. Elle trône entre les mèches rebelles, distillant de-ci de-la un regard sombre, éclairé par le rayonnement éclatant du soleil matinal qui traverse maintenant les nuages.

La pluie s’est arrêtée. Je suis partagé. L’idée de déposer cette passagère hors normes à la prochaine aire d’autoroute fait son chemin pourtant quelque part, elle me fascine, peut-être parce qu’elle est différente. Et c’est cette différence qui m’attire. Une différence si gigantesques que j’ai conscience de l’imperméabilité de nos deux mondes ; elle dans sa sphère asociale et moi dans le confort d’une vie bien rangée. La « Belle et la Bête » en mode inversé.

Elle est là, recroquevillée sur elle même, presque comme une fleur délicate, une fleur au goût sauvage, au parfum humide. Dans son sommeil, une confiance calculée, une confiance que je peux rompre simplement en la renvoyant dans son univers à elle, en continuant ma route comme si de rien n’était, en restant tranquillement installé dans mon aisance bourgeoise, les yeux fermés sur le reste.

Devant le ruban d’asphalte qui s’annonce et qui mène directement à l’aire d’autoroute, mon clignotant refuse de fonctionner ; rébellion de ma conscience, rébellion de mes mains, rébellion de mon corps et, sans résistance, je me laisse convaincre de poursuivre ma route en sa compagnie.

Harmonie s’étire, un bras en l’air, les pieds calés contre le plancher de la voiture. Dans son mouvement d’extension, elle pousse un grognement pour réveiller ses muscles endormis avec une moue dubitative avant d’ouvrir un œil aguerri sur le paysage qui défile inlassablement sous nos yeux.

- On est où ?
- On va bientôt passer Amiens. Vous avez dormi une petite heure.
- J’espère que je n’ai pas ronflé.
- Non ça allait. Enfin, ça restait supportable.
- Désolée. Parfois, je m’entends et c’est super énervant.
- On va rencontrer un gros bouchon, un accident. Il faudra sortir de l’autoroute.
- Vous avez la possibilité de quitter l’A16 pour rejoindre l’A1 en passant par Montdidier et d’ailleurs c’est ce que vous indique le GPS. De mes souvenirs d’enfance, la route est plutôt bonne et l’arrivée sur Paris est beaucoup plus tranquille en passant par là.
- Vous connaissez ?
- Oui mes parents habitent ou habitaient, je ne sais plus, à côté de Compiègne, un village assez modeste, un peu atypique. Ça fait un bail que je ne suis pas passée par ici,
- Ça fait longtemps que vous n’avez pas vu vos parents ?
- C’est compliqué. Je préfère ne pas en parler.
- Vous faites quoi dans la vie ?
- Rien ! Je vis de ce que les gens me donnent. Et comme je suis une femme, j’apitoie probablement davantage et donc j’obtiens un peu plus que les autres. Je ne me plains pas. Et vous ?
- Je suis dans la fonction publique, j’occupe un poste d‘encadrement dans le domaine administratif.
- Ah ! Fonctionnaire ! En tout qu’à, ça a l’air de bien payer. Je vous voyais plutôt dirigeant d’entreprise, PDG, un gros poste quoi plutôt qu’un petit rond-de-cuir.
- Vous êtes toujours aussi désobligeante lorsque vous parler des autres ?
- Excusez-moi, je n’avais pas l’intention de vous froisser.
- On ne peut pas dire que ça ne sortait pas du fond du cœur. Qu’est-ce que vous avez contre les fonctionnaires ?
- « Le petit prince », ça vous parle ? Le petit bonhomme un peu grassouillet qui va défroquer tous les matins à la même heure en lisant son journal.
- Saint-Exupéry ! Oui évidemment que ça me parle. Vous avez lu « Le petite prince » ?
- Mais vous me prenez pour une attardée ou quoi ? Ce n’est pas parce que j’ai l’apparence d’une moins que rien que je n’ai pas un minimum de culture. Je pourrai probablement vous en apprendre si vous vous donniez au moins la peine d’éviter de me juger sur les apparences.
- Ce n’est pas ce que vous avez fait en montant dans la voiture ?
- Vous êtes trop énervant. Je ne vous adresse plus la parole.

Un silence s’installe, de celui qui de toute évidence met mal à l’aise. Harmonie regarde droit devant elle, le visage figé, contrariée, agacée, presque irritée par sa propre intransigeance. Elle se triture les mains avec une certaine nervosité renforçant davantage encore le sentiment de mal-être général. Au bout de quelques minutes, elle tourne son visage vers moi, un visage marqué par le désespoir ; un visage où les yeux brillent magnifiquement, embués par des larmes embryonnaires.

- Si vous voulez me déposer, vous n’avez qu’à vous arrêter à la prochaine aire.
- Et si on reprenait depuis le début plutôt ?
- A quoi bon ! De toute façon vous vous foutez des gens comme moi, sans intérêt, catalogué au premier regard, des gens qui vivent aux crochet de la société, des bons à rien, des fainéants, des inutiles, des fardeaux du capitalisme.
- Je suis vraiment désolé et si je vous ai offensée, je m’en excuse sincèrement.
- Non, c’est moi qui m’excuse. Je ne me suis pas contrôlée. Ces derniers temps, j’ai beaucoup plus de difficulté à me maîtriser. Vous n’y êtes pour rien. Je craque comme ça, sans raison apparente. Les nerfs sans doute, l’angoisse peut-être, la peur de ce que sera demain. Pas de présent, pas d’avenir, juste un passé pas toujours très glorieux mais parfois j’arrivais au moins à y trouver mes moments à moi, ceux où je me sentais heureuse même si ça n’a jamais duré très longtemps. Et ces moments de bonheur, aussi infimes soient-t’ils, c’était ici dans la région, juste à quelques kilomètres d’ici.
- Où exactement ?
- A cinq minutes à peine, au Nord de Compiègne.
- Si je vous propose un deal, vous l’accepteriez ?

- °° -



Re : L'autostoppeuse (hétéro) - En cours - emmanolife - 15-06-2021

Une autostoppeuse comme celle-là, c'est sûr que ça change les idées. Patrick est un grand calme, il accepte les commentaires désobligeants d'Harmonie, il doit prendre ça comme un test de son équanimité. A moins qu'il n'ait une autre idée derrière la tête, on sait qu'il est en état de manque.

Je me demande bien quel pouvait être l'objet, dans la malle de sa voiture, qui a révélé à Patrick l'orientation sexuelle de sa fille. J'ai beau me creuser la cervelle, je ne vois pas d'objet sexuel spécifiquement lesbien, mais je ne suis peut-être pas un expert en ce domaine.

Et encore un point de détail (oui, j'aime bien pinailler). Pour une fille, on ne dit pas une homosexuelle, on dit une lesbienne. J'avais commis la même erreur dans une discussion avec une lesbienne, et je m'étais vertement fait remettre à ma place : c'était il y a 20 ou 30 ans, mais ça m'est resté ! Le terme homosexuel est réservé aux garçon, les filles sont des lesbiennes !